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Jason renvoie à Jonas, le livre de Jonas offrant de nombreuses similitudes avec le récit de Jason et des argonautes. Nicolas Poussin utilise souvent des allégories grecques ou gréco-romaines pour illustrer les thèmes chrétiens. Images allégoriques tant par le monde de la fable très utilisé par Poussin, que par les paraboles de la bible.
Pour des sujets tirés de la fable ou de la Bible, Poussin fabriquait un "petit théâtre" de figurines de cire, qu’il modelait suivant les attitudes qu’il désirait donner à ses personnages, et qu’il plaçait à l’intérieur d’une boîte. Les parois de la boîte percées de trous, lui permettaient de régler l’éclairage de la scène. Dans le fond il faisait coulisser un décor dessiné, paysage ou architecture. On retrouve cette méthode de travail dans le récit de Jason, ou fable astronomique de la Toison d’or. Poussin a bien posé le « décor » de son histoire.
Cette fable de Jason, vient partiellement dans le poème solaire sur Hercule, et forme un épisode du « 9e Travail d’Hercule », ou de celui qui répond au Bélier céleste. Le thème de l’Arcadie est présent sur les terres romaines, patrie d’adoption de Nicolas Poussin : Evandre, le héros de l’Eneide, en souvenir de sa patrie en Arcadie, fonda une colonie grecque sur l’emplacement de Rome. Poussin a baigné dans cette culture, qu’il connaît si bien.
Toute l’histoire d’Hercule, héros solaire, s’explique par le ciel, comme le serpentaire Jason, héros solaire, initié par une magicienne, conquérant de la royauté et de l’immortalité confronté à Draco la baleine céleste, monstre marin, « démon de gardien » de la Toison d’or. Jason solaire, céleste, est le serpentaire ou charmeur de serpent, serpentaire dont une des étoiles est une tête de chameau… Chaque détail du tableau est important, précis, car Poussin, ne fait rien au hasard.
Jason est le soleil en astronomie. Le soleil qui atteint le point équinoxial du printemps caractérisé par la constellation du Bélier, celui-ci représenté par le Dieu Pan, Dieu cornu, aux pieds de bouc mais aussi d’une grande laideur.
Le Bélier céleste ou Bélier à Toison d’or, monte au moment où le soleil se lève, le jour de l’équinoxe de printemps. Le passage du soleil, au signe du Bélier à Toison d’or est marqué par le lever du navire Argos. |
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L’astronomie est un domaine que maîtrise et que chérit le peintre. De la fable à la parabole biblique, de Jason et le Bélier céleste à Jésus, ou agneau Dieu, Dieu sauveur, du vaisseau Argos à la barque céleste, vers quel « signe » nous amène le peintre ? Jésus prophète tel Jonas, roi comme Jason, ramène ses compagnons, vers la céleste patrie ? Pour Nicolas Poussin, les mystères du Christ ne seraient-ils pas les mystères du Dieu Soleil dans son triomphe équinoxial ? C’est à l’équinoxe de printemps que le Christ triomphe. L’évangile de Matthieu est le lien, le fil biblique attaché à ces deux tableaux.
Les chrétiens ne remplacèrent-ils pas le nom de Jésus par Jason, qui est devenu le nom hellénisé de Jésus ?
Mathieu donne à Jésus une généalogie royale. Il se réfère au prophète Jésus, comme un roi, fils d’Abraham et de David. Le prophète Jésus qui au Mont des Oliviers trois jours avant sa mort, annonce la destruction du temple de Salomon par Titus, et la fin du monde, lorsque les apôtres lui demandent : « dis nous quand cela arrivera-t-il, quel sera le SIGNE de ton avènement et de la fin du monde ? » (Mathieu XXIV 1-3). En passant de la mythologie à la Bible, en superposant les thèmes ce qu’aimait faire Poussin, ce dernier nous renvoie par l’évangile de Mathieu, du signe de Jonas, évoquant la mort et la résurrection de Jésus, à la Barque de Pierre, barque céleste, tel l’arche de Noé prise dans la tempête, qui amène au jugement dernier (Mathieu XII 39-42). Pour Mathieu, le royaume des cieux est comparable « à un filet que l’on jette à la mer », ainsi en sera-t-il à la fin du monde ? (Mathieu XIII 47-50). Cette pêche miraculeuse, qui rassemble une multitude de « poissons » est une autre façon de raconter l’histoire du jugement dernier, victoire du règne Dieu, arrachant les humains aux forces du mal, aux eaux profondes. L’apparition de Jésus, peut être vue comme son avènement, associée au jugement dernier, le retour du Christ sauveur, tel que Jésus l’avait annoncée aux apôtres au Mont des oliviers... Dans l’évangile de Mathieu, le jugement dernier est associé à la révélation de la Reine du Midi, et à Salomon. Comme il est dit dans l’évangile de Mathieu : « …et ici il y a plus que Salomon » (Mathieu XII 42). Pour Nicolas Poussin, un tableau ne doit il pas être lu comme un récit, une composition avec des signes visibles et invisibles…?
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